dimanche, octobre 12, 2008

Les crises de la semaine

Le monde est en crise. C'est du moins ce que l'on peut lire en première page de tous les journaux de la planète. Les Bourses dégringolent et les petits épargnants voient leurs économies fondre. Pour sauver un système économique artificiellement gonflé, on est même allé puiser dans les poches des contribuables pour tenter de sauver un système financier qui favorise une minorité, pour sauver Wall Street. Mais, on le sait, une crise financière n'est jamais éternelle. Ce qui descend remonte, inévitablement. À terme, tout redevient normal, et la consommation peut reprendre son rythme de croissance. Une crise financière n'est pas éternelle.

Pendant que les journaux nous inondent de scénarios catastrophe au sujet de la future récession, une autre crise se dévoile sous nos yeux sans que les gens s'en inquiètent outre mesure. Pourtant, cette crise sera irréversible, et tout l'argent de la planète n'arrivera pas à ramener à la vie les espèces qui disparaîtront par simple insouciance. Je parle évidemment de la crise de la biodiversité. L'ampleur de cette crise est sans précédent. Selon le réputé magazine Science, de 25% à 36% de toutes les espèces de mammifères de la planète seraient en danger d'extinction. Des centaines d'espèces de mammifères risquent de disparaître durant notre simple passage sur cette planète. Et, faut-il le rappeler: l'extinction, elle, est pour toujours!

Quand la crise financière ébranle l'économie, les dirigeants de la planète se mobilisent. Quand la crise de la biodiversité menace la vie, on fait la sourde oreille. Lors de la dernière conférence de l'ONU, certains pays ont essayé de mobiliser les dirigeants de la planète, mais rien en comparaison de la présente crise financière. L'Allemagne a dégagé 800 millions de dollars dans un fonds pour l'application d'une Convention sur la biodiversité, ce qui a incité d'autres pays à investir dans la recherche de mesures visant la conservation des espèces. Le Canada a pour sa part annoncé un investissement de 50 000$ pour la formation d'un comité d'étude... Or, le comité d'étude international qui vient de publier ses résultats regroupe déjà 1800 scientifiques de 130 pays! Un minuscule comité d'étude canadien et un investissement dérisoire dans l'une des plus importantes crises planétaires sont inacceptables, surtout pour un pays bordé par trois océans et qui possède des forêts ancestrales, une grande partie de l'Arctique et une variété impressionnante d'écosystèmes uniques au monde.
Il y a aussi la crise planétaire des changements climatiques qui touche tous les domaines de la sacro-sainte économie. Cette semaine, 230 économistes canadiens parmi les plus réputés au pays ont exigé un plan d'action immédiat pour lutter contre le réchauffement planétaire. Au même moment, 120 scientifiques canadiens, des experts du climat, ont dénoncé l'inaction du gouvernement conservateur et affirmé que l'absence de mesures concrètes et efficaces pour lutter contre la crise des changements climatiques allait augmenter les risques et faire gonfler les coûts d'une action qui, de toute façon, sera nécessaire. Les scientifiques, pour une rare fois dans une campagne électorale, prennent position et invitent la population à voter stratégiquement pour l'environnement mardi prochain.
Il y a aussi la crise alimentaire qui frappe les pays les plus pauvres de la planète, le résultat d'une économie de libre marché qui a complètement dérapé. Et je ne vous parle pas de la crise de l'accès à l'eau potable qui fera de plus en plus de victimes dans le monde.
Le monde est en crise, et plusieurs crises sévissent en même temps. Analysez bien la situation et vous constaterez qu'elles sont souvent liées. Certaines crises semblent mobiliser davantage que d'autres. Mais faisons-nous vraiment les bons choix dans nos efforts de sauvetage? Investissons-nous dans les bons secteurs pour préserver ce qu'il y a de plus précieux sur cette planète: la vie, sous toutes ses formes?

LA SCIENCE EN BREF
La fumée chinoise
Les maladies respiratoires sont parmi les 10 plus importantes causes de décès en Chine. Près de la moitié de la population fume, on fait la cuisine au bois et plus de 70% des maisons sont chauffées au bois ou au charbon. La cigarette, jumelée à la combustion de bois et de combustibles fossiles à l'intérieur des maisons, constitue une véritable menace pour la santé des Chinois. Selon une récente étude du département de santé publique de l'Université Harvard, si la tendance se maintient, on peut prévoir que d'ici 25 ans, environ 65 millions de Chinois mourront de maladies respiratoires, alors que 18 autres millions succomberont à des cancers du poumon. On dit qu'il n'y a pas de fumée sans feu...

Davantage de tempêtes en Arctique
Une récente étude de la NASA confirme une augmentation de la fréquence et de l'intensité des tempêtes en Arctique au cours des 50 dernières années. Les scientifiques viennent ainsi confirmer l'hypothèse qui veut que le réchauffement du climat puisse accentuer la force des tempêtes en mer. Ces tempêtes causent aussi une accélération de la dérive de la glace arctique. En déterminant les modes de déplacement des tempêtes, les scientifiques ont pu comparer les vitesses de dérive de la glace au cours des 56 dernières années. Ils ont remarqué une augmentation de la vitesse de dérive de 20 à 60 centimètres par seconde en été, et de 15 à 60 centimètres par seconde en hiver. Ces changements importants dans les mouvements du couvert de glace modifieront aussi la physique des océans, ce qui risque d'influer sur la grande machine climatique planétaire, pour le meilleur (les océans sont de formidables puits de carbone) ou pour le pire (le réchauffement accéléré de la température des océans cause une plus grande absorption de chaleur). À suivre...
Le recul des glaciers en Alaska
Un nouveau livre sur l'état des glaciers de l'Alaska confirme que plus de 99% des grands glaciers de cette région reculent rapidement devant le réchauffement accéléré de cette région du monde. Même si la grande majorité de ces glaciers perdent du terrain, s'amincissent ou demeurent stables, il subsiste encore un très petit nombre de glaciers, surtout situés en haute altitude, qui continuent de gagner du terrain de façon surprenante. Le livre de 550 pages montre des photos impressionnantes de l'évolution rapide des glaciers au cours des ans. Une nouvelle source d'inspiration pour les futures conférences d'Al Gore...
12 octobre 2008 / Jean Lemire / La Presse

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