samedi, avril 04, 2009

Loin de la «refondation» du capitalisme

Il était illusoire d'attendre du sommet du G20 une rupture avec l'idéologie libérale qui guide les dirigeants des principales économies de la planète. Beaucoup nourrissaient cependant l'espoir qu'une action cohérente et coordonnée serait enfin décidée pour remédier au plus vite à l'inquiétante récession de l'économie mondiale.
L'électrochoc espéré par certains n'est toujours pas à l'ordre du jour. Les mesures de régulation auxquelles tenaient tant les Européens sont loin de représenter la «refondation» du capitalisme ressassée à longueur de colonnes. En effet, ni le contrôle des salaires des dirigeants des banques, ni la timide mise à l'index des paradis fiscaux ne modifieront fondamentalement le fonctionnement d'un système qui creuse les inégalités en hypothéquant l'avenir de la planète tout entière.
Au plan de l'effort financier visant à la relance globale, les 5.000 milliards de dollars destinés à financer les conditions de la reprise ne sont qu'une pure consolidation des programmes déjà engagés, aucun dollar d'argent frais n'étant de fait mobilisé pour l'élargissement de la relance.
Certes, en entérinant ces mesures, les théologiens du marché, urgemment reconvertis en néo-keynésiens circonstanciels, mangent leur chapeau en remisant au rayon des lubies la dérégulation hier encore célébrée comme la panacée miraculeuse et universelle.
Pour la mise en oeuvre des mesures financières, le consensus du G7 élargi s'est naturellement porté sur le renforcement du rôle des quatre institutions financières du libéralisme mondialisé, le FMI, la Banque mondiale, l'OMC et un nouveau venu, le Financial Stability Board. Mais si leurs capacités sont augmentées, aucune modification du fonctionnement des trois premières nommées n'est évoquée.
Pourtant, ces instruments ont amplement démontré, au fil des plans d'ajustement, des choix désastreux de stratégie (les cotonculteurs africains en savent quelque chose) et des désarmements tarifaires, leur nature d'instruments au service du développement... des multinationales.
La crise financière, qui s'est irrésistiblement transformée en récession, continue, en révélant l'ampleur absurde de la spéculation, à présenter des factures de plus en plus lourdes à l'ensemble de la planète. Loin de Londres, le tiers de la population mondiale qui n'avait pas voix au chapitre, ni l'UA ni l'évanescent Nepad n'ayant de réelle audience, paiera au prix fort un cataclysme économique dans le déclenchement duquel il ne porte aucune responsabilité.
Nul ne s'y trompe, les dispositions quasi caritatives adoptées à Londres sont loin d'être convaincantes. Elles ne permettent pas, de l'avis de tous les experts, de renverser une tendance extrêmement inquiétante.
A cette aune, les salves d'autocongratulations entendues avant même l'ouverture de ce sommet sont-elles justifiées ? Le sommet de Londres a-t-il été vraiment un événement «historique» ? Reconnaissant le caractère exceptionnel de la crise, les dirigeants des pays riches ne semblent pas avoir pris la mesure des implications vitales d'une récession profonde et durable.
Les dispositifs arrêtés à Londres, pour importants qu'ils puissent paraître au plan symbolique, sont-ils à la hauteur des enjeux ? La prochaine réunion du G20, prévue pour cet automne, verra sans doute les premiers éléments de réponse à ces questions.
par K. Selim / Editorial

G20, OTAN, mais que devient l'ONU ?
A priori, il n'y a aucun lien ni fil conducteur qui relie le sommet du G20 qui vient de se tenir à Londres, et celui de l'OTAN, dont les travaux se sont ouverts hier soir dans la ville de Baden-Baden, en Allemagne.
Le premier a regroupé les chefs d'Etat des 20 principales puissances économiques et financières de la planète, avec pour thématique la crise économique mondiale et les solutions à prendre pour tenter de l'enrayer. Le second a réuni ceux dont les pays sont membres de l'Organisation du traité de défense de l'Atlantique Nord. Ce second sommet a célébré le 60e anniversaire de la création de l'OTAN, avec pour axe de ses débats la consolidation des capacités de cette organisation qui, d'instrument de défense du camp occidental durant la Guerre froide, est devenu, depuis la fin de celle-ci, le bras séculier de l'Occident à vocation interventionniste dans tous les conflits ou crises survenant à travers la planète et risquant de mettre en péril les intérêts géostratégiques de ce monde occidental.
Les deux sommets ont pourtant cela de commun qu'ils consacrent la volonté d'une minorité d'Etats à s'ériger en pouvoir dirigeant au-dessus du reste du monde, au principe qu'ils sont soit les plus grandes puissances économiques, soit militaires. Ce qui est la négation même de l'ordre mondial international tel qu'il a été instauré au lendemain de la Deuxième Guerre mondiale, avec l'ONU comme lieu et coeur de la gouvernance mondiale.
La création du G8, devenu récemment G20, et la transformation de l'OTAN depuis les années 90 en une organisation d'interventions militaires à vocation planétaire, remettent effectivement totalement en cause le rôle dévolu à l'ONU par ses fondateurs, puisque les décisions tant économiques que militaires qui ont un impact planétaire se décident désormais ailleurs qu'en son enceinte. Il en découle que 90% des pays constituant la communauté internationale sont exclus de la concertation et de la prise de décision concernant les affaires du monde.
Que le G20 et l'OTAN s'attachent dans l'urgence, à solutionner pour le premier la grave crise économique et financière qui souffle sur la planète, et le second à éteindre les foyers d'où se propagent les germes d'une déstabilisation internationale, est la démonstration que l'ordre mondial tel que voulu par la charte des Nations unies est maintenant caduc. Ce qui pose la nécessité de sa refondation.
Même si le G20 s'exprime au nom des 20 principales puissances économiques et financières de la planète, a-t-il pour autant la légalité internationale, telle que représentée par l'ONU, pour trancher des affaires économiques mondiales sans concertation avec le reste du monde ? L'OTAN a-t-elle celle de faire la guerre là où elle le veut quand elle le veut sans en référer à l'ONU et sans le feu vert de celle-ci ?
Il y a que la gouvernance du monde a pratiquement échappé à l'ONU, pour être confisquée par des blocs ou des alliances qui agissent pour instaurer leur prédominance sur la planète.
Quoi de plus normal alors que d'autres alliances et d'autres regroupements se constituent pour tenter de contrer leur visées hégémoniques ! Avec tous les risques que la stabilité et la paix mondiales en soient sérieusement ébranlées.
par Kharroubi Habib /Analyse
4 avril 2009 - Le Quotidien d’Oran
4.4.09 21:43

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