Maroc : une étudiante jugée pour avoir manifesté
Ce jeudi s’ouvre à Marrakech le procès d’une militante de gauche, Zahra Boudkour, et de dix étudiants. Leur crime ? Avoir manifesté après l’intoxication de plusieurs de leurs camarades.
Ce jeudi devrait s’ouvrir devant la Cour d’appel de Marrakech le procès de Zahra Boudkour, plus jeune détenue d’opinion du Maroc, et de dix autres jeunes étudiants. S’il s’ouvre, ce procès, qui a déjà été reporté à plusieurs reprises, mettra une fois de plus en lumière les dysfonctionnements de la justice marocaine, impitoyable avec les petits et complaisante avec les puissants.
Rappelons les faits. En mai 2008, une vingtaine d’étudiants de Marrakech consomment un jus de fruit périmé et, sérieusement intoxiqués, doivent être hospitalisés. L’établissement de soins réclame 1000 dirhams – une petite centaine d’euros – à chaque étudiant, une somme trop élevée pour ces jeunes issus de familles modestes. Une marche de 3.000 étudiants démarre alors le 14 mai. Les CMI (compagnies mobiles d’intervention) s’en donnent à cœur joie et tapent sur tout ce qui bouge. Abdelkader Bahi, un étudiant en droit, tombe du quatrième étage d’un bâtiment de la cité universitaire et se trouve aujourd’hui dans un fauteuil roulant, la colonne vertébrale brisée.
Torturée pendant cinq jours
Arrêtée avec 18 autres étudiants de l’Université Cadi Ayad, Zahra Boudkour est rouée de coups, torturée et violentée pendant cinq jours, dans un poste de police proche de la Jamaa el Fna (une place touristique de Marrakech). Depuis, elle attend en prison d’être jugée. Durant les six premiers mois, rien ne lui a été épargné : insultes des gardiennes, menaces de codétenues manipulées par la direction, examens ratés, humiliations diverses.
Militante d’extrême gauche, comme ses camarades, Zahra se bat pour une université gratuite et pour une société plus juste. Ses idées irritent profondément les autorités, à commencer par un certain Ahmed Taoual, adjoint du préfet de police de Marrakech, qui a couvert toutes ces brutalités et proféré des menaces de mort à l’égard des étudiants.
Les forces de l’ordre, de dérapage en dérapage
Les dérapages de l’appareil sécuritaire auraient plutôt tendance à se multiplier par les temps qui courent. A Khenichet, dans le Gharb (au nord-ouest du pays), une dizaine d’habitants ont été condamnés il y a quelques semaines à plusieurs mois de prison pour avoir demandé de l’aide pour se reloger, leurs maisons en pisé n’ayant pas résisté aux pluies diluviennes qui s’étaient abattues sur la région. Les manifestants avaient été brutalement réprimés par les hommes de Hamidou Laanigri
« Ainsi, la police de la nouvelle ère, dix ans après l’accession au trône de Mohammed VI, est restée la même : une police de la répression et de l’injustice, du mépris envers le citoyen marocain et des abus qui rappellent les moments difficiles des années de plomb », écrit cette semaine Le Journal Hebdomadaire. Selon le journal, ni les opérations de marketing, ni les campagnes de communication ne pourront améliorer l’image du royaume (dont les autorités sont si soucieuses) aussi longtemps que les responsables de la sécurité et de la justice, à commencer par le sieur Taoual, n’auront pas changé radicalement de comportement et d’état d’esprit.
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