mardi, avril 11, 2006

Je prends congé, je rentre

Je prends congé, je rentre
chez moi, dans mes rêves,
je retourne en Patagonie
où le vent frappe les étables
où l’océan disperse la glace.
Je ne suis quet je vous aime tous,
je vais errant par le monde que j’aime :’un poète
dans ma patrie
on emprisonne les mineurs et le soldat
commande au juge.
Mais j’aime, moi, jusqu’aux racines
de mon petit pays si froid.
Si je devais mourir cent fois,
c’est là que je voudrais mourir
et si je devais naître cent fois
c’est là aussi que je veux naître
près de l’araucaria sauvage,
des bourrasques du vent du sud
et des cloches depuis peu acquises.
Qu’aucun de vous ne pense à moi.
Pensons plutôt à toute la terre,
frappons amoureusement sur la table.
Je ne veux pas revoir le sang
imbiber le pain, les haricots noirs,
la musique : je veux que viennent
avec moi le mineur, la fillette,
l’avocat, le marin
et le fabricant
Que nous allions au cinéma,
que nous sortions
boire le plus rouge des vins. de poupées
Je ne suis rien venu résoudre.
Je suis venu ici chanter
je suis venu
afin que tu chantes avec moi.
Pablo Neruda, Extrait de "El Canto General"
Pablo Neruda

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