La chance dans le malheur
Malheureusement Israël ne manqué jamais de nous ramener à point nommé à la triste réalité dans laquelle nous vivons. Depuis des mois maintenant, les Palestiniens ont systématiquement observé le train sur le point de dérailler, une guerre civile prête à éclater, en même temps que la mort de notre cause nationale toute entière. L’Accord de La Mecque signé entre le Hamas et le Fatah au début de février, dans lequel les deux parties se sont engagées à déposer les armes et à s’asseoir à une même table, fut une petite lueur d’espoir dans une situation par ailleurs de plus en plus désespérante.
Joharah Baker / publié le samedi 3 mars 2007 / France-Palestine
Joharah Baker / publié le samedi 3 mars 2007 / France-Palestine
Alors que les choses ont avancé dans ce domaine - les discussions sur l’unité nationale se sont poursuivies sans interruption depuis l’accord-, des violences factionnelles ont continué à éclater par moments dans la Bande de Gaza et en Cisjordanie. Ironiquement c’est Israël qui nous a ramenés à la raison, qui nous a rappelé ce pour quoi nous luttons et pourquoi, maintenant plus que jamais, il est absolument crucial que nous nous tenions unis.
Le 25 février, les troupes d’ occupation israéliennes ont attaqué la ville de Naplouse, en Cisjordanie, dans une incursion lancée avant l’aube, sous le couvert d’une force de 120 militaires. L’armée, qui prétend qu’elle est entrée dans Naplouse pour arrêter un certain nombre d’hommes recherchés et pour mettre au jour des fabriques d’explosifs, est toujours là , bien qu’elle se soit retirée pendant quelques heurs hier avant de revenir mercredi matin.
On considère que cette incursion est l’intervention militaire la plus importante menée à Naplouse depuis plus de six mois et qu’elle est loin d’être finie. Depuis ce matin [mercredi 28 février] les troupes sont revenues en force, particulièrement dans et autour de la Vieille Ville qui est la partie la plus peuplée de Naplouse et qu’on dit être aussi la plus résistante.
La plupart des militants sur la liste des personnes recherchées sont des membres de la branche militaire du Fatah, les Brigades des Martyrs d’ Al Aqsa. Israël qui n’a pas à ce jour réussi à trouver ces hommes, ne reculera devant rien pour aboutir à un résultat. Selon des sources prvenant de l’intérieur de Naplouse les soldats israéliens procèdent à des fouilles de maisons, une par une, et arrêtent les familles des militants recherché, afin de les amener à se rendre .
Les résidents de Naplouse sont actuellement soumis à des attaques de leurs maisons, à des arrestations et au couvre-feu. Les trois principaux hôpitaux de la ville ont eux aussi été encerclés par les forces israéliennes qui ont érigé des barrages pour empêcher tout mouvement vers et en provenance des hôpitaux. Les écoles sont fermées et trois d’entre elles, près de la Vieille Ville ont été transformées en camps militaires où les habitants sont détenus et interrogés sur les endroits où peuvent se trouver les rares "privilégiés" qu’Israël continue à pourchasser.
Dans tout ce désordre, s’est répandu dans Naplouse une constante d’unité , qui est non seulement admirable mais qui est aussi une leçon. Les dirigeants de toutes les factions ont appelé les gens à ne pas répondre aux exigences de l’ occupation qui veut qu’on leur remette les hommes, et des militants se sont dressés sur les toits pour combattre les forces d’occupation.
Depuis trois jours il n’y a eu aucune lutte interne à Naplouse, rien d’autre qu’un sens d’unité très fort et la réalisation qu’au bout du compte le seul ennemi qui menace les Palestiniens, c’est l’occupation israélienne.
Les gens ont aussi compris que la seule façon pour une ville entière de pouvoir supporter les coups de la puissance [occupante] dont l’objectif véritable est de mettre la résistance à genoux, c’est de se tenir liés, bras et esprits, et de faire face à la tempête d’un front uni et fort.
Cette leçon a aussi été entendue dans d’autres parties de la Cisjordanie. Mercredi matin à Jénine, trois membres des Brigades Al Quds, la branche armée du Jihad islamique, dont Ashraf Saadi, le commandant du Jihad pour la Cisjordanie, ont été assassinés par des commandos des forces spéciales israéliennes camouflés.
Immédiatement après les assassinats, des Palestiniens du camp de réfugiés de Jénine sont descendus dans la rue, surtout des membres des Brigad Al Quds et Al Aqsa. Au niveau politique ça ne se serait pas passé si facilement. Historiquement le Jihad s’est toujours opposé à beaucoup des positions de principe du Fatah, y compris le récent Accord de La Mecque, auquel il dit ne pas pouvoir adhérer parce qu’il implique une reconnaissance des accords précédemment signés avec Israël.
Pourtant, dans la rue, ces différences n’avaient pas de sens. Quand Israël frappe, comme les atrocités des derniers jours, c’est un rappel douloureux que nous avons beaucoup plus important à faire que nous disputer pour savoir qui prendra tel ministère...
Israël fait même des allusions à une nouvelle opération de l’armée possible à Gaza, cette fois ci sous le prétexte du “renforcement continu du Hamas”, d’après le ministre de la Défense israélien, Amir Peretz. Depuis maintenant des mois, Gaza est ravagée par des combats internes, une rivalité armée entre le Hamas et le Fatah qui a coûté la vie à des dizaines de Palestiniens. La semaine dernière encore, cinq personnes ont été tuées dans une vendetta familiale motivée par la politique à Khan Younis alors même que les dirigeants des deux factions ont interdit de faire couler le sang palestinien.
Le problème c’est que le tisu social de Gaza reste si abîmé et déchiré que, si et quand Israël attaque, s Palestiniens n’ont pas la moindre chance. Ce ne sont pas seulement des vies humaines qui sont en jeu. En plus de la mort et des destructions qui accompagnent inévitablement toute opération israélienne, cette fois notre cause nationale, nos aspirations et notre éternel rêve d’avoir notre propre Etat seront aux premières lignes, parce qu’il est bien plus facile de détruire une maison divisée que de briser les murs d’un foyer uni.
Il est vraiment malheureux qu’il faille une incursion israélienne majeure et l’assassinat de trois jeunes hommes pour nous faire sortir de notre sommeil, mais si nous avons une fois pour toutes appris notre leçon, alors nous aurons au moins trouvé la proverbiale chance dans le malheur.
Il est trop tôt pour le dire cependant, et les gens de Naplouse ont dans l’immédiat bien des difficultés qui les attendent. Mais c’est par de petites victoires successives qu’on obtient de grands succès et si nous sortons de ce dernier massacre israélien unis et non brisés, prêts à reprendre, puissants, notre lutte nationale, c’est un signe certain que, en tant que peuple, nous sommes sur la bonne voie.
3.3.07 12:46
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