jeudi, mai 15, 2008

Al-Nakba : il n’y a rien à célébrer

Aucune bougie n’éclaire la pénombre, aucune chanson n’est chantée, aucun ruban n’orne les cadeaux, aucun rire ne salue les invités, car la Nakba n’est pas un jour de célébration.
« La voix du sang de ton frère crie de la terre jusqu’à moi, » pleure le Seigneur, et alors le crime doit être jugé et la justice rendue.
William A. Cook - Palestine Chronicle / 13 mai 2008 / Info-palestine
Le 14 Mai 2008 est la date anniversaire de deux évènements capitaux : la “Déclaration d’Indépendance” du nouvel état d’Israël et le jour désastreux de l’infamie, la Nakba [La Catastrophe], qui marquent pour eux à la fois le massacre de Palestiniens et leur pénible marche vers l’exil.
Ironiquement, comme l’histoire biblique de Caïn et Abel, frères de sang et ennemis dans leurs desseins, cette date porte la marque du Tout-puissant.
Ecoutez Caïn alors qu’il marche aux côtés de son frère sur le chemin de la mort : “Il n’y a ni jugement ni juge ni autre monde ! Point de remise de récompense pour les justes ni de châtiment pour les méchants.” Telle est la conviction de ceux qui se déclarent libres de toute responsabilité vis-à-vis de leur frère, n’acceptent aucun blâme pour leur tromperie, ou n’ont aucun remord pour la cruauté qu’ils infligent. Sans que son comportement soit jugé comme bon ou mauvais, sans récompense pour des actes d’amour ou de compassion, sans châtiment pour le mal et la cruauté envers son frère, Caïn est libre de faire ce qu’il veut. Ultime liberté, une déclaration effective d’indépendance.
Abel répond à son frère avec les seuls mots qu’il lui restent alors qu’il marche à la mort, un appel à la conscience qui nous lie tous dans une mutuelle existence, la croyance « qu’il y a un jugement et un juge et un autre monde ! Qu’il y a remise de récompense pour les justes et châtiment pour les méchants ». Sans cette croyance, ceux qui le veulent peuvent impunément piller le pauvre, opprimer les sans défense, faire en sorte de pervertir la justice, répandre la violence et faire couler le sang sur le monde.
Ce 14 Mai, alors que l’Etat d’Israël se complait dans les discours de félicitations des députés australiens, canadiens et américains, alors que nos présentateurs de télévision dissertent avec poésie à propos de la transformation d’une terre vide en une terre comblée de lait et de miel, tandis que le mythe d’un peuple rentré dans sa patrie héréditaire inonde les airs en niant la réelle existence du peuple indigène qui y vit.
Alors qu’on nous répète encore et encore que ce nouvel Israël est menacé par les islamo-fascistes et les terroristes du Hamas qui tentent de l’effacer de la carte, le peuple de Palestine est laissé seul dans une prison toujours plus étroite, anbandonné à l’infamie de ses oppresseurs qui pillent sa terre, répandent la violence et font couler le sang de ceux qui sont sans défense.
Alors que des scènes de joie et de grosses festivités s’épanchent à la télévision, les peuples du monde voudraient-ils, pourraient-ils imaginer la misère qui encercle les familles tourmentées, encerclées par les forces juives sionistes qui empêchent chacun de leur mouvement ? Ces dernières, autrefois elles-mêmes enfermées derrière des murs, autrefois les victimes d’un pouvoir imposé par une force brutale, autrefois les objets d’injures humiliantes, autrefois les oubliés du monde qui pleuraient dans le vent pour un peu de soulagement et de réconfort, aujourd’hui ces personnes portent elles-mêmes l’uniforme des forces occupantes qui ont conduit leurs pères et leurs mères dans les wagons et dans les chambres de la mort, isolés et seuls.
Aujourd’hui ce peuple est ressuscité en une nouvelle nation pleine de tout l’abominable attirail qui donne la permission aux gens les plus dépravées de la terre d’infliger leur avarice, les pillages, la tromperie et une débauche bestiale sur les sans défense.
A l’occasion de ce soixantième anniversaire du « nouvel » Etat juif , ne devrions-nous pas accueillir Israël au rang des nations qui infligent leur force dévastatrice sur les populations indigènes qu’elles ont envahies, les populations qu’elles ont massacrées à Deir Yassin et dans d’autres villages détruits par un impitoyable saccage qui a marqué les mois précédant le naissance du 14 mai ? Parmi les nations qui maintiennent [ces populations] enfermées derrière le Mur de la Haine qui les cloître comme du bétail, les soumettant à un lent nettoyage ethnique et à un génocide calculé d’avance ? Ne devrions-nous pas accueillir Israël au rang de ces nations qui se glorifient d’avoir établi leur nation sur les tombes de ceux qu’ils ont massacrés - L’Australie, le Canada et les Etats-Unis ?
Sous l’élégant et chatoyant verre des lustres de la salle de bal, le maître de cérémonie lève sa coupe de cristal emplie de vin rouge-sang pour la quatrième fois, inconscient de l’ironie qu’il porte dans sa main, et appelle l’assemblée à féliciter tous ceux qui ont rendu possible la renaissance d’Israël, particulièrement l’ancien Premier Ministre dans le coma, Ariel Sharon, qui a tellement fait pour concevoir et mettre en oeuvre la création de cet état érigé pardessus les villes et villages de ses anciens habitants.
Au-delà de cette salle de bal, au-delà des colliers de perles portés par d’élégantes dames se tenant modestement aux côtés de leurs maris impérialement vêtus de costumes rayés, au-delà de la façade bleue vitrée de ce gratte-ciel moderne, au-delà des plages et des parasols qui bordent la Méditerranée, au-delà des rues propres et coquettes où les clients flânent à travers des produits de luxe venus du monde entier et qui remplissent les bijouteries et les devantures, au-delà de l’embêtant mur gris qui répand ses ombres derrière les haies, invisible, sourd et ignoré, vit, dans une sombre misère faite de dénuement, le peuple qui a vécu en Palestine pendant des siècles. Ce peuple est maintenant réduit à la mendicité, dépendant, pour se nourrir, de nations qu’il ne connait pas, ses maisons réduites en ruines dans un paysage de ruines, des milliers de sans-abri vivant à Gaza sans électricité, sans eau courante, sans équipements sanitaires - le reste vivant de l’indifférence, de l’arrogance et d’une épouvantable inhumanité.
Et pour conclure, pour donner la parole à la réalité, ils ne veulent pas que leur propre peuple voit ni que le monde voit, le gouvernement sioniste et ses laquets se lamentent, déclarent que de tels mots sont paroles de haine, antisémitisme, quand en fait c’est l’état d’Israël qui est antisémite, qui est rempli de discours de haine répandu sur le mur même de peur et de haine à l’encontre des Palestiniens qu’ils ont érigé, et qui est le destructeur de l’âme du judaïsme.
Apprenons de cette antique histoire biblique des frères de sang qui se trouve dans la Genèse 4:1-16 et le Coran 5:26-32, ainsi que dans les Parchemins de la Mer Morte 4Q242, que nous voyons comme une représentation métaphorique de la première victime innocente de la puissance du mal. Ironiquement, c’est cette victime, selon le Livre d’Enoch (22:7) et le Testament d’Abraham (A:13/B:11), qui s’élève en position de « juge des âmes ». Dieu proclame que tout homme doit être jugé par les hommes, puis par les 12 tribus d’Israël, et enfin le jugement dernier par le Seigneur Lui-même qui doit être parfait et définitif.
« La voix du sang de ton frère crie de la terre jusqu’à moi », pleure le Seigneur, et alors le crime doit être jugé et la justice rendue. Toute l’humanité endossera les robes de la justice afin de condamner le fratricide ; les 12 tribus d’Israël jugeront par elles-mêmes ; et Dieu Tout-puissant jettera la malédiction suprême — ce sol que Caïn a labouré, cette terre qu’il a volé à son frère, n’apportera plus de fruits et, par conséquent, il sera une fois de plus un fugitif et un vagabond sur la terre. C’est ainsi que l’intention de Caïn — assouvissant son égoïsme, atténuant sa jalousie, relâchant son agression — révèle le décalage entre son mal inhérent et sa nature supérieure.
En cest temps de cadeaux d’anniversaire, Israël est l’héritier d’un monde témoin du meurtre gratuit de son frère, le peuple sémite de Palestine, qui meurt chaque jour, un par un, dans la chaleur torride du soleil de midi, oublié et seul. Aucune bougie n’éclaire la pénombre, aucune chanson n’est chantée, aucun ruban n’orne les cadeaux, aucun rire ne salue les invités, car la Nakba n’est pas un jour de célébration. Et ainsi résonnent les mots d’Esaïe en ce jour : « Ah, nation pécheresse, peuple chargé d’iniquité, race de gens malins, enfants qui ne font que se corrompre, qui ont abandonné le Seigneur. » Que chacun de nous qui entende cet appel n’oublie pas que le mal peut être chassé de la terre.

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mercredi, mai 14, 2008

En Chine, le séisme aurait fait au moins 20.000 morts

À Dujiangyan, le travail des secouristes est compliqué par les amas de gravats © WENN/SIPA
14/05/2008 Le Point.fr
Il ne s'agit que d'un bilan provisoire, sans doute encore largement sous-estimé. Le séisme qui a secoué lundi l'ouest de la Chine aurait fait près de 20.000 morts et dizaines de milliers de disparus dans la région du sud-ouest du pays. Sans prendre en compte les chiffres avancés par les responsables locaux, le gouvernement parle lui de près de 15.000 morts. On compte plus de 14.000 morts et près de 40.000 disparus dans la seule province du Sichuan (sud-ouest), où a été localisé l'épicentre. Sept autres régions du pays ont été touchées par ce tremblement de terre d'une magnitude de 7,9 sur l'échelle de Richter, le plus violent en Chine depuis plus de 30 ans.
Mesures d'urgence
Le tremblement de terre meurtrier s'est produit lundi à 8 h 28, heure française - 14 h 28, heure locale - à environ 92 kilomètres au nord-ouest de Chengdu, capitale de la province du Sichuan, située sur les contreforts du Tibet. Son épicentre était situé à 10 kilomètres sous la surface, a rapporté l'Agence américaine de géologie (USGS). L'endroit le plus sinistré se situe sur le côté oriental du plateau tibétain, une zone généralement peu peuplée en raison des hautes montagnes. Peu après le séisme, les autorités ont décidé de fermer l'aéroport international de Chengdu et l'armée a été envoyée pour secourir les victimes, ont annoncé les médias officiels. Le président Hu Jintao a ordonné de déployer tous les efforts pour venir en aide aux victimes du tremblement de terre, selon l'agence officielle Chine nouvelle. Plus de 50.000 soldats ont été mobilisés. Le Premier ministre Wen Jiabao s'est rendu sur les lieux de l'épicentre, dans le district de Wenchuan. Dans une interview accordée à la télévision chinoise, il a qualifié de "désastre" le séisme et a appelé la population "au calme et au courage".
Le barrage des Trois-Gorges serait intact
Le barrage géant des Trois-Gorges, sur le fleuve Yangzi, dans le centre de la Chine, n'aurait pas souffert du séisme, a fait savoir son gestionnaire. "Les contrôles ont montré qu'il n'y a rien qui sorte de l'ordinaire", a certifié la société China Three Gorges Project, gestionnaire du barrage hydroélectrique. Le tremblement de terre a néanmoins été perçu dans la région du barrage, un mur de béton de 185 mètres de haut, qui crée une retenue de 39 milliards de m3. Les installations pour les Jeux olympiques de Pékin, qui auront lieu début août, n'ont pas été endommagées, a tenu à rassurer un porte-parole du Comité d'organisation. "Elles sont antisismiques jusqu'à un niveau assez élevé et aucun dégât n'a été constaté", a-t-il précisé. Les instances sportives chinoises ont en revanche annoncé que le trajet de la flamme olympique serait raccourci, sans donner plus de précisions. Selon le programme initial, le relais devait passer en juin par les régions sinistrées. Une étape à Chengdu, épicentre du séisme, était prévue le 18 juin.
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mardi, mai 13, 2008

La famine mondiale


En cette époque d'après-guerre froide, l'humanité est confrontée à une crise économique et sociale d'une ampleur sans précédent et qui entraîne un appauvrissement rapide de larges secteurs de la population mondiale. Les économies nationales s'effondrent, le chômage est endémique. Des famines se déclarent en Afrique subsaharienne, en Asie du Sud et dans certaines parties de l'Amérique latine. Cette « mondialisation de la pauvreté, » qui a annulé bon nombre des progrès de la décolonisation d'après-guerre, a commencé dans le tiers-monde avec la crise de la dette du début des années 1980 et l'imposition des réformes économiques meurtrières du Fonds monétaires international (FMI).
Mondialisation.ca, Le 4 mai 2008 / par Michel Chossudovsky
Ce Nouvel Ordre Mondial se nourrit de la pauvreté humaine et de la destruction de l'environnement. Il engendre la ségrégation sociale, il encourage le racisme et les conflits ethniques et s'attaque aux droits des femmes et il précipite souvent les pays dans des affrontements destructeurs entre les nationalités. Depuis les années 1990, il s'étend, par l'entremise du « libre marché », dans toutes les régions du monde y compris l'Amérique du Nord, l'Europe occidentale, les pays de l'ex-bloc soviétique et les « nouveaux pays industriels » (NPI) de l'Asie du Sud-est et de l'Extrême-Orient. Cette crise planétaire est encore plus dévastatrice que la Grande Dépression des années 1930. Elle a de lourdes conséquences géopolitiques; le démembrement économique donne lieu à des guerres régionales, à la fracture des sociétés nationales et, dans certains cas, à l'anéantissement de pays. Elle constitue de loin la plus grave crise économique des temps modernes. (Livre de Michel Chossudovsky intitulé : Mondialisation de la pauvreté et le nouvel ordre mondial) (Livre de Michel Chossudovsky intitulé : )

Introduction
La famine est le résultat d'un processus de restructuration en « marché libre » de l'économie mondiale qui prend ses assises dans la crise de la dette du début des années 1980. Ce n'est pas un phénomène récent, tel qu'il a été suggéré par plusieurs reportages des médias occidentaux, en se concentrant strictement sur l'offre et la demande à court terme des produits agricoles de base.
La pauvreté et la sous-alimentation chronique sont des conditions qui préexistaient avant les récentes hausses des prix des produits alimentaires. Ces derniers frappent de plein fouet une population appauvrie, qui a à peine les moyens de survivre. Des émeutes de la faim ont éclaté presque simultanément dans toutes les grandes régions du monde: « Les prix des denrées alimentaires en Haïti a augmenté en moyenne de 40 % en moins d'un an, avec le coût des produits de première nécessitée tels que le riz qui a doublé... Au Bangladesh, [à la fin avril 2008] quelques 20,000 travailleurs du textile sont descendus dans la rue pour dénoncer l'augmentation vertigineuse des prix des produits alimentaires et aussi pour demander des salaires plus élevés. Le prix du riz dans le pays a doublé au cours de la dernière année, menaçant les travailleurs qui gagnent un salaire mensuel de seulement 25 $ et qui ont faim. En Égypte, des protestations de travailleurs concernant les prix des produits alimentaires a secoué le centre industriel du textile de Mahalla al-Kobra, au nord du Caire, pendant deux jours la semaine dernière, où deux personnes ont été abattues par les forces de sécurité.
Des centaines de personnes ont été arrêtées et le gouvernement a envoyé des policiers en civil dans les usines pour forcer les travailleurs à travailler. Les prix des denrées alimentaires ont augmenté de 40% en Égypte au cours de la dernière année... Plus tôt ce mois-ci, en Côte d'Ivoire, des milliers de personnes ont marché vers la maison du président Laurent Gbagbo, scandant « nous sommes affamés » et « la vie est trop chère, vous allez nous tuer » . Des manifestations de même nature ainsi que des grèves et des affrontements sont survenus en Bolivie, au Pérou, au Mexique, en Indonésie, aux Philippines, au Pakistan, en Ouzbékistan, en Thaïlande, au Yémen, en Éthiopie et à travers la majeure partie de l'Afrique subsaharienne. » (Bill Van Auken, Amid mounting food crisis, governments fear revolution of the hungry, Global Research, April 2008) Avec de grands pans de la population mondiale déjà bien en dessous du seuil de pauvreté, la hausse des prix des denrées alimentaires de base qui se produit sur une courte période est dévastatrice. Des millions de personnes dans le monde sont dans l'incapacité d'acheter de la nourriture pour leur survie Ces augmentations contribuent d'une manière très réelle à « éliminer les pauvres » à travers « la mort par la famine. » Dit dans les mots de Henry Kissinger: « Contrôlez le pétrole et vous contrôlerez les nations, contrôlez la nourriture et vous contrôlerez la population. » À cet égard, Kissinger a fait savoir à travers le « Mémorandum d'études sur la sécurité nationale de 1974: Les implications de la croissance de la population mondiale sur la sécurité et les intérêts étrangers des États-Unis, » que des famines récurrentes pourraient constituer de facto un instrument de contrôle de la population. Selon l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture, le prix des céréales a augmenté de 88% depuis mars 2007. Le prix du blé a augmenté de 181% sur une période de trois ans. Le prix du riz a augmenté de 50% dans les trois derniers mois (Voir Ian Angus, Food Crisis: "The greatest demonstration of the historical failure of the capitalist model", Global Research, April 2008): « La plus populaire variété de riz de la Thaïlande se vendait il y a 5 ans 198 $ US et à 323 $ la tonne l'an dernier. En avril 2008, le prix a atteint 1000 $. Les augmentations sont encore plus élevées sur les marchés locaux; en Haïti, le prix d'un sac de 50 kilos de riz a doublé en une semaine à la fin mars 2008. Ces augmentations sont catastrophiques pour les 2,6 milliards de personnes dans le monde qui vivent avec moins de 2 $ US par jour et qui consacrent de 60% à 80% de leurs revenus à l'alimentation. Des centaines de millions de personnes n'ont pas les moyens de manger » (Ibid)

Deux dimensions interdépendantes
Il y a deux dimensions interdépendantes dans la crise alimentaire mondiale en cours, qui plonge des millions de personnes à travers le monde dans la famine et la privation chronique, une situation où des populations entières n'ont plus les moyens d'acheter de la nourriture. Tout d'abord, il y a un processus historique à long terme de politiques de réforme macroéconomiques et de restructuration économique mondiale, qui a contribué à baisser le niveau de vie partout dans le monde, autant dans les pays développés que dans les pays en développement. Deuxièmement, ces conditions historiques préexistantes de pauvreté de masse ont été exacerbées et aggravées par la récente flambée des prix des céréales, qui a entraîné dans certains cas, le doublement du prix de détail des denrées alimentaires de base. Ces hausses de prix sont en grande partie le résultat de la spéculation boursière sur les denrées alimentaires de base.

La soudaine augmentation spéculative sur le prix des céréales
Les médias ont induit en erreur l'opinion publique sur les causes de ces hausses de prix, en se concentrant presque exclusivement sur la question des coûts de production, le climat et d'autres facteurs qui ont pour effet de réduire l'offre et qui pourraient contribuer à gonfler les prix des aliments de base. Bien que ces facteurs puissent entrer en jeu, ils ne peuvent expliquer à eux seuls l'impressionnante et spectaculaire hausse des prix des produits de base. L'escalade des prix des produits alimentaires est en grande partie le résultat d'une manipulation du marché. Elle est en grande partie attribuable à la spéculation boursière sur les marchés des matières premières. Les prix des céréales sont artificiellement gonflés par la spéculation à grande échelle sur les opérations des marchés boursiers de New York et de Chicago. Il est intéressant de noter qu'en 2007, le Chicago Board of Trade (CBOT), a fusionné avec le Chicago Mercantile Exchange, formant la plus importante entité au monde traitant dans le commerce des produits de base et comptant un large éventail d'instruments spéculatifs (les options, les options sur contrat à terme, les fonds indiciels, etc.) Des transactions spéculatives sur le blé, le riz ou le maïs, peuvent se produire sans qu'il y ait de transactions réelles de ces produits. Les institutions, qui actuellement spéculent sur le marché des céréales, ne sont pas nécessairement impliquées dans la vente ou la livraison des grains. Les transactions peuvent se faire par fonds indiciels qui permettent de parier sur la hausse ou la baisse en général de la variation des prix des marchandises. Une « option de vente » est un pari que les prix vont baisser, une « option d'achat » est un pari que les prix vont augmenter. Grâce à la manipulation concertée, les opérateurs institutionnels et les institutions financières font augmenter les prix. Ils placent alors leurs paris sur la hausse du prix d'un produit en particulier. La spéculation génère la volatilité du marché. À son tour, l'instabilité qui en résulte encourage la poursuite de l'activité spéculative. Les bénéfices sont réalisés lorsque le prix monte. En revanche, si le spéculateur est un short-selling (1), le bénéfice sera réalisé lorsque le prix diminuera. Cette récente flambée spéculative des prix des denrées alimentaires a engendré un processus mondial de création de la famine à une échelle sans précédent. Ces opérations spéculatives ne devraient pas pouvoir engendrer délibérément la famine. Ce qui cause la famine est l'absence de procédures réglementaires relatives au commerce spéculatif (les options, les options sur contrat à terme, les fonds indiciels). Dans le contexte actuel, un gel des transactions spéculatives sur les produits alimentaires de base, décrété par décision politique, contribuerait immédiatement à faire baisser les prix des produits alimentaires. Rien n'empêche que ces opérations soient neutralisées et désamorcées par un ensemble soigneusement élaboré de mesures réglementaires. Visiblement, ce n'est pas ce qui est proposé par la Banque mondiale et le Fonds monétaire international (FMI).
Le rôle du FMI et de la Banque mondiale
La Banque mondiale et le FMI ont présenté un plan d'urgence, afin d'accroître l'agriculture en réponse à la « crise alimentaire. » Cependant, les causes de cette crise ne sont pas prises en compte. Robert B. Zoellick, le président de la Banque mondiale décrit cette initiative comme un « new deal, » un plan d'action « pour un accroissement à long terme de la production agricole, » qui consiste entre autres à doubler les prêts agricoles pour les agriculteurs africains. « Nous devons dépenser notre argent en fonction des besoins réels.» (We have to put our money where our mouth is now so we can put food into hungry mouths) (Robert Zoellick, président de la Banque mondiale, BBC, 2 mai 2008) La « médecine économique » du FMI et de la Banque mondiale n'est pas la « solution, » elle est plutôt en grande partie la « cause » de la famine dans les pays en développement. Plus le FMI et la Banque mondiale prêtent « pour accroître l'agriculture » et plus ils augmenteront les niveaux d'endettement. La « politique de prêts » de la Banque mondiale consiste à accorder des prêts à la condition que les pays se conforment à l'agenda politique néolibérale qui, depuis le début des années 1980, a été propice à l'effondrement de l'agriculture alimentaire locale. La « stabilisation macro-économique » et les programmes d'ajustement structurel imposés par le FMI et la Banque mondiale aux pays en développement (comme condition de renégociation de leur dette extérieure) ont conduit à l'appauvrissement de centaines de millions de personnes. Les dures réalités économiques et sociales derrières les interventions du FMI sont les causes de l'augmentation démesurée des prix des produits alimentaires, des famine au niveau local, des licenciements massifs de travailleurs urbains et de fonctionnaires et de la destruction des programmes sociaux. Le pouvoir d'achat interne s'est effondré, les cliniques de santé contre la famine et les écoles ont été fermées, des centaines de millions d'enfants ont été privés du droit à l'enseignement primaire.
La déréglementation des marchés céréaliers
Depuis les années 1980, les marchés céréaliers ont été déréglementés sous la supervision de la Banque mondiale et des surplus céréaliers des États-Unis et de l'Union européenne ont systématiquement été utilisés pour détruire la paysannerie et pour déstabiliser l'agriculture alimentaire nationale. À cet égard, les prêts de la Banque mondiale exigent la levée des barrières commerciales sur les importations de produits agricoles de base, conduisant au dumping des surplus céréaliers des États-Unis et de l'Union européenne sur le marché local. Ces mesures, ainsi ques d'autres mesures, ont mené les producteurs agricoles locaux à la faillite. Un « marché céréalier libre », imposé par le FMI et la Banque mondiale, détruit l'économie paysanne et affaibli la « sécurité alimentaire. » Le Malawi et le Zimbabwe étaient auparavant des pays prospères en excédent céréalier, le Rwanda était pratiquement autosuffisant en matière alimentaire jusqu'à 1990, date à laquelle le FMI a ordonné le dumping des excédents céréaliers de l'Union européenne et des États-Unis sur le marché intérieur, précipitant ainsi les petits agriculteurs en faillite. En 1991-1992, la famine a frappé le Kenya, un pays qui connaissait un succès pour ses surplus céréaliers. Le gouvernement de Nairobi avait précédemment été mis sur une liste noire pour ne pas avoir obéi à des recommandations du FMI. La déréglementation du marché des céréales a été exigée comme une des conditions pour le rééchelonnement de la dette extérieure de Nairobi avec les créanciers officiels du Club de Paris. (Livre de Michel Chossudovsky, Mondialisation de la pauvreté et le nouvel ordre mondial) Dans toute l'Afrique, ainsi qu'en Asie du Sud-est et en Amérique latine, le modèle des « ajustements structurels » dans l'agriculture sous la tutelle des institutions de Bretton Woods a servi de manière sans équivoque à la disparition de la sécurité alimentaire. La dépendance vis-à-vis du marché mondial a été renforcée, entraînant une augmentation des importations de céréales commerciales, ainsi qu'une augmentation de l'afflux « d'aide alimentaire. » Les producteurs agricoles ont été encouragés à abandonner l'agriculture alimentaire et à se convertir dans des cultures de « haute valeur » à des fins d'exportation, souvent au détriment de l'autosuffisance alimentaire. Les produits de grande valeur ainsi que les cultures à des fins d'exportation ont été soutenus par des prêts de la Banque mondiale. Les famines à l'ère de la mondialisation sont le résultat de ces politiques. La famine n'est pas la conséquence d'un manque de nourriture, c'est en fait tout le contraire: les surplus alimentaires mondiaux sont utilisés pour déstabiliser la production agricole dans les pays en développement. Strictement réglementée et contrôlée par l'industrie agroalimentaire internationale, cette offre excédentaire est finalement propice à la stagnation de la production et de la consommation des produits alimentaires de base essentiels et à l'appauvrissement des agriculteurs dans le monde. En outre, en cette époque de mondialisation, les programmes d'ajustement structurel du FMI et de la Banque mondiale ont un lien direct sur le processus de développement de la famine, car ils affaiblissent systématiquement toutes les catégories d'activités économiques urbaines ou rurales, qui ne servent pas directement les intérêts du marché mondial. Les revenus des agriculteurs dans les pays riches et dans les pays pauvres sont réduits par une poignée d'industriels du secteur de l'agroalimentaire mondial qui en même temps contrôlent les marchés des céréales, les intrants agricoles, les semences et la transformation des aliments. La géante société Cargill Inc avec plus de 140 filiales et sociétés affiliées à travers le monde contrôle une part importante du commerce international des céréales. Depuis les années 1950, Cargill est devenue le principal contractant pour « l'aide alimentaire » des États-Unis financée par la Loi Publique 480 (1954). L'agriculture mondiale a pour la première fois de l'histoire, la capacité de satisfaire les besoins alimentaires de toute la planète, mais la nature même du marché mondial de ce système ne permet pas que ça se réalise. La capacité de produire de la nourriture est immense, mais les niveaux de consommation alimentaire restent extrêmement faibles, car une grande partie de la population mondiale vit dans des conditions d'extrême pauvreté et de privation. En outre, le processus de « modernisation » de l'agriculture a conduit à la dépossession des paysans et à l'augmentation du niveau de dégradation des terres et de l'environnement. Autrement dit, les forces mêmes qui encouragent la production alimentaire mondiale à se développer favorisent également une diminution du niveau de vie et une baisse de la demande de nourriture.
Le traitement choc du FMI
Historiquement, les escalades de prix des produits alimentaires au niveau du commerce en détail ont été déclenchées par la dévaluation des monnaies, qui ont toujours été le résultat invariable d'une situation hyper inflationniste. Par exemple, en août 1990 au Pérou, sur les ordres du FMI, du jour au lendemain le prix du carburant a été multiplié par 30 et le prix du pain a été multiplié par 12 : « Partout dans le tiers-monde, la situation est celle du désespoir social et de la désolation d'une population appauvrie par l'interaction des forces du marché. Les émeutes contre les programmes d'ajustement structurel et les soulèvements populaires sont sauvagement réprimées: À Caracas, en 1989, le président Carlos Andres Perez qui après avoir dénoncé avec éloquence le FMI d'exercer « un totalitarisme économique qui ne tue pas par des balles mais par la famine », a déclaré un état d'urgence et a régulièrement envoyé des unités d'infanterie et des commandos de la marine dans les quartiers pauvres (barrios de ranchos) sur les collines surplombant la capitale. Les émeutes anti-FMI de Caracas ont été déclenchées à la suite d'une augmentation de 200 % du prix du pain. Hommes, femmes et enfants ont essuyé des tirs sans discernement: « Il a été rapporté que la morgue de Caracas comptait jusqu'à 200 cadavres de personnes tuées dans les trois premiers jours ... et elle a avisé qu'elle était à court de cercueils. Officieusement plus d'un millier de personnes ont été tuées. Tunis, en janvier 1984: les émeutes du pain instiguées en grande partie par de jeunes chômeurs pour protester contre la hausse des prix alimentaires. Au Nigeria en 1989: les émeutes des étudiants contre les programmes d'ajustement structurel ont entraîné la fermeture de six universités du pays par les Forces armées. Au Maroc, en 1990: une grève générale et un soulèvement populaire contre les réformes du gouvernement parrainées par le FMI. » (Michel Chossudovsky, op cit.)

Les semences génétiquement modifiées
Coïncidant avec la création de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) en 1995, un autre important changement historique a eu lieu dans la structure de l'agriculture mondiale. Dans le cadre du contrat de l'Organisation mondiale du commerce (OMC)), les géants de l'agroalimentaire ont une entière liberté d'entrer dans les marchés céréaliers des pays en développement. L'acquisition de « droits de propriété intellectuelle » exclusifs sur les variétés végétales par des intérêts agroindustriels favorise aussi la destruction de la biodiversité. Agissant au nom d'une poignée de conglomérats de biotechnologie, des semences OGM ont été imposées aux agriculteurs, souvent dans le cadre de « programmes d'aide alimentaire. » Par exemple, en Éthiopie des trousses de semences OGM ont été remis aux agriculteurs pauvres afin de rétablir la production agricole à la suite d'une grande sécheresse. Les semences OGM ont été plantées, donnant une seule récolte. Mais après, les agriculteurs ont réalisé que les semences OGM ne pourraient pas être replantées sans payer de redevances à Monsanto, Arch Daniel Midland et al. Ensuite, les agriculteurs ont découvert que les graines ne pousseraient que s'ils utilisaient les intrants agricoles soit, les engrais, les insecticides et les herbicides qui sont produits et distribués par les entreprises agroalimentaires de biotechnologie. Toute l'économie paysanne est dorénavant enfermée entre les mains des conglomérats de l'agro-industrie. Avec l'adoption généralisée de semences OGM, une transition majeure a eu lieu dans la structure et dans l'histoire de l'agriculture depuis sa création il y a 10,000 ans. La reproduction de semences au niveau des villages et chez les producteurs de semences a été perturbée par l'utilisation de semences génétiquement modifiées. Le cycle agricole, qui permet aux agriculteurs de stocker leurs semences biologiques et de les semer pour en tirer la prochaine récolte a été brisé. Ce concept destructeur, produisant invariablement la famine, est reproduit partout, pays après pays, conduisant à la disparition de l'économie paysanne mondiale.

13.5.08 14:39

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